Nous citerons très modestement Gisèle Halimi, qui bien malgré elle, est devenue le sujet de toutes les discussions. En 2020, elle écrivait dans son livre Une farouche envie de Liberté – avec toute la force qui la caractérise – ces mots, des mots qui résonnent encore étrangement aujourd’hui : 

« Qui pourrait affirmer que nos sociétés sont désormais égalitaires ? Que la question est réglée, que les femmes jouissent d’un statut équivalant à celui des hommes, qu’elles ne sont pas sous-sujets, sous-citoyennes, sous-représentées dans les instances décisionnelles ? Avez-vous vu les photos de la table des négociations sur les retraites à Matignon ? Ou celles des discussions de paix sur la Syrie, l’Irak, l’Afghanistan ? Des hommes, des hommes, des hommes. En 2020. C’est consternant. »

C’est parce que nous souhaitons, en ce 8 mars, lui rendre ses lettres de noblesse, qu’avec beaucoup d’admiration nous reprenons les mots de celle qui fut et restera pour beaucoup un exemple de la lutte féministe. 

Emmanuel Macron se trompe, une nouvelle fois, en voulant séparer la femme de la militante. Gisèle Halimi était avant tout une militante. Elle incarnait à elle seule tous les combats d’une époque. Tout en elle était combat, de son plus jeune âge jusqu’à son dernier souffle. Elle laisse un héritage à toute une génération de filles et de femmes pour qu’ensemble elles construisent le féminisme de demain. Celui qui réussira à tendre vers un universalisme des droits et des libertés pour permettre la construction d’un nouveau contrat social entre les deux sexes. Bien évidement, cela passe par l’éducation. Il nous faut donc responsabiliser, très tôt, les générations futures. Pour ce faire, nous avons besoin de toutes les forces car la société ne progresse pas seule. Ainsi, nous pourrons espérer que demain nous n’aurons plus besoin d’exprimer la voix des femmes…

Hélas, l’actualité du moment prouve tout le contraire : la lutte n’est pas encore finie. En France et à de si nombreux endroits dans le monde, nous constatons que les femmes restent les premières victimes des injustices, du simple fait qu’elles soient nées Femme. Elles sont encore trop souvent confrontées à des réflexes d’une société qui a trop longtemps considéré que les hommes prévalaient sur elles. Une société du patriarcat dans laquelle les femmes évolue bien malgré elles.

En France…

Le droit de vote des femmes en France a été accordé en 1944 alors que les hommes l’ont obtenu en 1848. Alors que la Turquie, a décidé par la voix de son Président, le 20 mars 2021, à la suite d’un décret présidentiel, de quitter la Convention d’Istanbul réprimant la violence à l’égard des femmes et la violence domestique !

La France signataire de cette convention, n’est pas meilleure élève. En effet, en France, une femme est victime toutes les trois minutes de violence conjugale, qu’elle soit physique, sexuelle ou psychologique. Des violences qui ont fait 208 000 victimes en 2021. Un chiffre en forte hausse de 21% par rapport à 2020. 

106 femmes ont été tuées sous les coups de leur conjoint ou ex-conjoint, entre le 1er janvier et le 26 décembre 2022, selon le décompte du collectif « Féminicides par compagnon ou ex ». Depuis, le début de l’année 2023, 26 femmes ont perdu la vie parce qu’un homme a décidé de leur ôter. 26 dont 11 sur le seul mois de février et 2 sur les premiers jours du mois de mars. Alors, où en sommes-nous de la « grande cause nationale du quinquennat » ? 

A l’heure où, partout dans le monde, les forces réactionnaires progressent, où les droits des femmes sont menacés, la France doit retrouver un rôle de pionnière et d’espérance. 

Chaque année plus de 20 000 femmes ont recours à l’IVG en France. Une femme sur trois en moyenne y recourt dans sa vie. Pourtant, ici comme partout dans le monde, on observe depuis plusieurs années des velléités de revenir sur ce droit fondamental, à la faveur de l’extrême droite ou de manifestation anti-IVG. 

Le Parlement a pourtant tranché la question et est favorable à l’inscription du droit à l’IVG dans la Constitution. Une immense avancée que nous ne pouvons que saluer. Les conditions étant réunies, Emmanuel Macron a, enfin fait le choix d’inscrire la liberté de recourir à l’interruption volontaire de grossesse dans la Constitution. Cela offre un signe d’espoir à ces millions de femmes, privées de ce droit en Europe et dans de nombreux pays. 

Ce combat, nous le devons à Gisèle Halimi mais aussi à toutes celles qui s’engagent au quotidien, que cela soit dans la rue ou dans les institutions. Vous contribuez chaque jour par vos actions au mieux vivre des femmes !

Chacun le sait, la France vit en ce moment un mouvement social inédit et de grande ampleur. Ce 8 mars a, par ailleurs, été l’occasion d’appeler les femmes à investir massivement les rues pour obtenir le retrait du projet de réforme des retraites, qui va les pénaliser plus sévèrement. Et elles l’ont fait, comme elles l’ont toujours fait lors des grandes protestations sociales. Nous ne cessons de le rappeler depuis plusieurs semaines, cette réforme manque d’équité envers les femmes qui devraient allonger leur carrière davantage que celles des hommes. 

Il s’agit d’un projet de réforme injuste, inique et inégalitaire et malgré cela, le gouvernement regarde ailleurs et n’entend pas les revendications. 

Les femmes restent, encore en 2023, sous-employées et moins bien payées que les hommes, alors même qu’elles sont davantage diplômées. Selon l’INSEE, en 2021, les femmes gagnaient en moyenne près de 15% de moins que les hommes dans le secteur privée. Nous sommes en 2023, et nous demandons encore l’égalité salariale entre les femmes et les hommes. 

Il est urgent que les pouvoirs publics y mettent davantage de moyens ; écoutent mieux les voix des femmes qui ne cessent d’alerter sur la question des inégalités entre les femmes et les hommes ; et agissent plus fortement pour mieux protéger les femmes et accompagner les territoires qui s’engagent dans la lutte contre les inégalités femmes-hommes.

A de si nombreux endroits dans le monde…

Elle l’écrivait dans Une Farouche liberté, en 2020 « Cela reste une malédiction de naitre fille dans la plupart des pays du monde, à tout le moins un manque de chance, et ce constat m’est douloureux ». 

La place des femmes est, sans cesse, remise en cause dans les sociétés. Il nous est difficile de penser le 8 mars, sans évoquer les femmes afghanes et les femmes iraniennes qui fièrement marchent d’une seule et même voix, solidaires dans leur lutte contre un régime mortifère qui les empêche d’affirmer leur identité, leur dignité et leur liberté ! 

Elles sont devenues le visage de la lutte féministe mondiale. Au delà de l’admiration que nous leur portons, nous apprenons beaucoup de leurs combats et serons plus que jamais à vos côtes pour vous accompagner dans votre quête de liberté et combattre l’oppression orchestrée par les pouvoirs rigoristes envers les femmes, chez vous, mais aussi partout dans le monde. 

Le 15 août 2021, c’est avec une grande inquiétude que nous avions vécu en direct, la prise du pouvoir de l’Afghanistan par les Talibans. Depuis, les femmes afghanes continuent de se battre – sans relâche – pour imposer leur liberté face aux injonctions des talibans, qui souhaitent purement et simplement les effacer de la société. Avec pour seule volonté restreindre la vie quotidienne des femmes et des filles, mais aussi les priver de leur avenir et les dépouiller de leur identité et de leur dignité ! 

A quelques kilomètres de là, quelques mois après, un autre mouvement protestataire se réveille suite à la disparition d’une jeune iranienne – Masha Amini – qui avait été arrêtée à Téhéran par la police des moeurs car une mèche dépassait de son voile. Depuis, le peuple iranien se soulève. Hommes et Femmes sont ensemble pour dénoncer le régime en place qui ne recule devant rien pour stopper la contestation : coupure d’internet pour empêcher les communications ; arrestation préventive des citoyens ; jette en prison toutes celles et ceux qu’ils soupçonnent d’avoir participé aux mobilisations ; tue celles et ceux qui descendent dans la rue … Pourtant, elles sont toujours dans la rue, fières et courageuses, retirent leur voile, dansent et coupent leur cheveux dans un pays où elles sont obligées de le porter dans les lieux publics. Ces gestes symboliques sont le signe d’une volonté d’émancipation forte, d’un pas vers la liberté. 

Ailleurs dans le monde les droits des femmes sont baffoués parce que femme, comme ces trois militantes cubaines qui ont été arrêtées et interrogées car elles souhaitaient demander aux autorités l’autorisation de défiler pour la Journée internationale des droits des femmes. Défiler pour défendre publiquement les droits des femmes c’est l’objectif dans le monde sauf à Cuba. Alors même que la nouvelle Constitution cubaine – en date de 2019 – l’autorise mais dans la pratique les manifestations qui ne sont pas organisées par le gouvernement sont généralement interdites. Pourtant, la jeune génération porte de nouvelles initiatives afin de rendre visible ce phénomène longtemps passé sous silence. 

Bref, le combat pour les droits des femmes continuent partout dans le monde. La liberté, c’est le choix, disait Gisèle Halimi, alors comme elle faisons le choix de la liberté, ne nous résignons pas. Levons-nous avec toutes les femmes de la planète pour revendiquer nos droits et faire du monde de demain, un monde où nous n’aurons plus besoin d’exprimer la voix des femmes ! 

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