L’urbanisme traite un domaine de compétence large : transport, logement, environnement, développement du territoire. Il traite de l’organisation de la population sur le territoire et constitue un vecteur d’égalité et d’émancipation. Il existe un lien fort entre la question urbaine et la question sociale. Comment lutter contre la ségrégation sociale sans s’attaquer à l’enclavement de certains quartiers ? Comment lutter contre la précarité sans résoudre le problème des passoires thermiques ? Mais aussi entre urbanisme et environnement. Comment nous adapter aux conséquences du changement climatique sans végétaliser nos villes ?
Mais sa déclinaison comme politique publique à part entière à travers un ministère est confuse et changeante au gré des alternances. Un ministre pouvait être exclusivement chargé de la question urbaine (ou de la ville, selon l’appellation), comme avec le lancement des politiques de la ville sous le gouvernement Rocard, puis prolongé sous les gouvernements Valls et Ayrault. Il pouvait être simplement intégré à d’autres ministères comme le ministère des affaires sociales, au travail et à la solidarité de Jean-Pierre Raffarin.
Ne pas doter le champ de l’urbanisme d’un ministère revient avant tout à nier son existence en tant que politique publique à part entière. Ces choix témoignent du volontarisme politique – ou de son absence – en termes de vision urbaine, de compréhension des phénomènes sociaux et de la manière de les prendre en charge. L’urbanisme constitue une voie pacifique pour résoudre les problèmes sociaux et territoriaux auxquels la France fait face. Le négliger reviendrait à terme à laisser des tensions se développer, comme en 2005 lors de la révolte des banlieues ou en 2018 avec les gilets jaunes.
Pour le premier, la sortie de crise fut le plan Borloo, un plan de 12 milliards d’euros fondé sur trois axes : l’emploi, le logement et l’égalité des chances. Il a été salué autant à Gauche qu’à Droite. Rappelons qu’en 2018, Jean-Louis Borloo avait proposé au gouvernement un nouveau plan pour les banlieues, rejeté sans raison valable par le Président de la République. Quelques mois plus tard, le mouvement des Gilets jaunes commençait. Emmanuel Macron a privilégié la répression policière ne répondant en rien aux revendications sociales et aux inégalités structurelles et territoriales qui ont provoqué ce mouvement social inédit. Compenser l’absence de politique urbaine par une présence policière accrue consiste à s’attaquer aux conséquences de la fracture et pas à régler ses causes.
Les problématiques sont nombreuses et le chantier est titanesque : désinvestissement des territoires ruraux et vieillissement de leur population, disparition des services publics, précarité et chômage dans les banlieues défavorisées. Face à la fracture française, la France doit redonner du sens à la promesse républicaine et l’urbanisme a sa part à jouer dedans.
Il est temps de doter la France d’une politique urbaine à long terme. Faisons de l’urbanisme un outil politique au sens noble du terme, un outil de réduction des inégalités et vecteur d’espoir pour les territoires délaissés par les politiques publiques.